L'ÉTABLISSEMENT DES PONTS

Dans son ouvrage "les Préalpes Françaises du Sud" - Mr Raoul BLANCHARD publié en 1945 résume un demi-siècle d'efforts.

"On disposait d'une technique récente et fort populaire, qui venait de faire ses preuves sur le Rhône : celle des ponts suspendus. Or la Durance avait grand besoin de ponts, puisque le seul a traverser la rivière était le vieux pont de SISTERON, bâti en 1365 près des restes d'un ouvrage plus ancien.

Dès 1829, le Député GRAVIER faisant décider la construction de deux ouvrages, ceux de MIRABEAU et de CHATEAU ARNOUX, emplacements choisis parce que le lit majeur y est restreint et que les culées peuvent y être fondées sur un socle résistant ; construit de 1835 à 1837, le Pont de CHATEAU ARNOUX (ou de l'ESCALE), long de 118 m, était le type même de ces vieux ponts suspendus, étroits et légers, qui évoquent l'âge des Saint-Somoniens; il donnait une liaison SISTERON-DIGNE plus courte et plus commode que par la route tortueuse de VOLONNE. Presque aussitôt, on se mettait (1838) à un ouvrage d'exécution plus délicate, celui des MÉES, où cette fois il faut traverser la basse plaine sur des chaussées et fonder les piles sur les alluvions ; terminé à la fin de 1842, il était renversé par la crue de 1843 au jour fixé pour une inauguration solennelle; il ne fut rebâti que de 1854 à 1857 et comporte une pile au milieu avec une longueur de 165 m. Plus considérable encore était l'entreprise du Pont de MANOSQUE dont les travaux, débutant en 1841, furent balayés par la même crue de 1843 qui en plus emportait le Pont de MIRABEAU; repris après le désastre, l'ouvrage fut terminé en 1847; il érigeait, pour racheter une longueur de 200 mètres, deux piles intermédiaires fondées à même la rivière.

Une loi de 1845 décide la construction du pont de VOLONNE achevé en 1846, beaucoup plus aisé à édifier puisqu'il s'appuie des deux côtés sur la roche en place et que la longueur, au-dessus d'une Durance rétrécie, n'est que de 99 mètres. Ainsi au début du Second Empire, la rivière était traversée dans notre région par 5 ponts, dont 3 il est vrai dans le secteur d'amont, le plus court. La lacune du secteur d'aval ne fut comblée que tardivement par l'édification du pont d'ORAISON, inauguré en Avril 1888: ouvrage considérable, où la technique des ponts suspendus fut abandonnée pour celle de 7 arches en pierres de taille couvrant une longueur de 285 mètres, tandis que les chaussées d'accès à travers la basse plaine s'allongent sur 250 m. chacune.

Entre temps, on avait jeté sur la rivière, près du confluent de la Bléone, le pont métallique de SAINT A UBAN à l'usage de la voie ferrée de DIGNE, long de 190 m. sur trois piles et achevé en 1875.

L'intérêt de ces passages, complétés par le vieux pont de MALIJAI et celui de CHAUFFAUT sur la BLÉONE, par ceux de BRAS D'ASSE, de BRUNET et du Pont d'ASSE sur la rivière méridionale, est très vif. L'agriculture en éprouve d'heureux effets lorsqu'ils traversent la basse plaine, car des digues longitudinales viennent s'accrocher, à l'aval, aux chaussées surélevées et conquièrent ainsi sur le lit majeur de fertiles terroirs arrosables.

La communication désormais assurée entre les rives permet les échanges entre régions qui s'ignoraient ; surtout, les ponts mettent en relation aisée tout le domaine de la rive gauche avec un élément de trafic quasi révolutionnaire, la voie ferrée qui vient circuler sur la rive droite de la Durance. "

Localement on s'active, parfois dans le désordre, une concurrence s'établit avec ORAISON, une controverse s'installe dans la commune qui milite pour l'emplacement actuel et M. RAYBAUD LANGE de PAILLEROLS qui de son côté travaille à une liaison entre DABISSE et GANAGOBIE dans le secteur où navigue le Bac du Loup.

En 1826, un projet de pont en charpente à établir vis-à-vis des MEES reste dans les cartons. Au début des années 30, Mr RAYBAUD LANGE élabore un projet de pont de pierre à 5 arches de 30 m. avec chaussée de 6 m (préfigurant le pont de LA BRILLANNE à 7 arches construit 50 ans plus tard).

Ce projet, lié à d'importantes modifications routières fait beaucoup de bruit, officiellement la demande de pont suspendu au PLAN est déposée le 20 Mai 1836.

Il semble bien que cette émulation, pour ne pas dire plus, entre la ville et le PLAN, en galvanisant les énergies, ont été pour beaucoup dans l'édification précoce d'un pont aux MÉES.

Le Conseil Municipal réagit et réussit à faire échouer ce projet apparemment solide.

A plus d'un siècle de distance, chacun peut imaginer comment auraient évolué les économies locales, les villes, villages et hameaux si ce projet avait été mis en oeuvre.

Avant d'obtenir en 1838 l'accord des autorités pour un pont à péage vis-à-vis des MEES le conseil consacre de multiples réunions à l'examen des projets et aux relations avec les autorités.