Les Amis des Mées
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LES MATÉRIAUX DE CONSTRUCTION

 Les Galets   La Terre Cuite   La Chaux   Les Matériaux Importés 

"La pierre qu'on emploie aux Mées pour la construction des bâtiments, est peu propre à cela: ce sont des cailloux roulés qu'on tire de la rivière et qui n'ont que des surfaces lisses. Heureusement le mortier ou ciment dont on se sert est excellent et il lie tellement les pierres et les autres matériaux que le tout forme dans la suite qu'un corps indestructible. Il n'y a sur les lieux aucune carrière de plâtre : on est obligé d'en tirer de Digne ou de Volx. Les pierres de taille pour le montant des portes et des fenêtres viennent de Ganagobie, de Château Arnoux et même de Mane."
Notice de la Ville des Mées - Jean Jacques ESMIEU - 1803 (p. 29 à 30)


Jusqu'à ce que l'industrialisation des techniques rendent plus facile, moins cher, l'emploi de matériaux standards, préfabriqués, les habitations de chaque région reflétaient les ressources minérales du sol.

Pendant des siècles, les hommes de ce pays, guidés par un souci d'économie extrême, ont, pour construire leurs maisons, utilisé au mieux les matériaux trouves sur place. Les maisons ainsi faites étaient en parfaite harmonie avec le paysage. Parce qu'ils manquaient sur place, ou pour des raisons de prestige, d'esthétique, d'autres matériaux étaient "importés".

LES MATÉRIAUX DU PAYS.

LES GALETS   Retour en Haut de Page 

Dans cette partie de la vallée de la Durance, bordure du plateau de Valensole, le matériau le plus abondant est le galet. La Durance, et les rivières anciennes qui ont alimenté le dépôt de Riez-Valensole en ont roulé d'énormes quantités. Il était nécessaire de les retirer des champs pour faciliter les cultures. Les ''clappiers'' d'épierrage, les bords de la Durance constituaient de bonnes réserves de galets.

S'il abonde partout, le galet n'est pas facile d'emploi, car avec ses formes arrondies, il nécessite une assez grande quantité de mortier pour le caler, l'enrober, et une épaisseur de mur plus importante pour faire masse. Les maçons habiles de ce pays ont su les utiliser au mieux pour édifier des constructions qui ont défié les siècles.

Dans la construction en seuls galets une autre difficulté réside dans la réalisation des angles. Tout le savoir faire du maçon consistait à bien choisir les galets, à réserver ceux aux formes assez plates et longues pour chaîner les angles. Dans certains bâtiments, pour contourner la difficulté, le maçon arrondissait l'angle.

Si le plus souvent les galets sont employés tels quels, pour un parement plus régulier, pour les angles, certains étaient retaillés, le maçon aménageait alors avec une massette une face plane.

Une technique très ancienne, Romaine peut-on dire, utilisée pour une partie des murs de la chapelle St Roch, consistait à reprendre chaque galet, à l'équarrir complètement pour en faire un moellon soigneusement calibre qui ensuite était assemblé en lits réguliers. C'était la un travail (de Romain) très long, demandant une main d'oeuvre considérable. Pour les maisons d'habitation, au moins la façade principale, celle qu'on donne a voir, est traitée de façon plus élaborée afin de présenter une surface relativement lisse sur laquelle l'eau de pluie ruissellera mieux et qui a un aspect beaucoup plus esthétique.

Aujourd'hui, notre engouement pour les murs de pierres apparentes, nous fait réagir différemment. Le mur nu, brut, est gobeté, c'est à dire que l'on applique une couche peu épaisse de mortier, destinée à combler les joints et a niveler. Là dessus on peut ajouter le crépi fait de chaux grasse et de sable plus ou moins coloré suivant sa provenance. Ce crépi peut-être moucheté (au balai de genet par exemple), il reste alors tel quel ou plus grossièrement s'il doit recevoir encore l'enduit. Directement sur le crépi, ou sur l'enduit, on peut badigeonner du lait de chaux (chaux grasse délayée dans de l'eau) additionné éventuellement de matières colorantes (ocres).

Au fil des temps, pour les maisons peu entretenues, cet enduit, ce crépi se sont désagrégés et laissent apparaître les pierres. A première vue aujourd'hui, ces murs ne semblent jamais avoir été crépis, mais en regardant attentivement, sous la génoise, dans certains recoins bien abrités, on retrouvera les traces de l'enduit primitif ou du badigeon.

Sur l'enduit de la façade, périodiquement était applique un nouveau badigeonnage au lait de chaux, cela redonnait un petit air de nouveauté à la façade et renforçait sa résistance aux intempéries. On appliquait aussi ce badigeon de lait de chaux à l'intérieur des bergeries, des étables, des poulaillers, des pigeonniers, car il désinfectait et assainissait ces locaux. Les murs des dépendances, remises, bergeries, granges.... étaient laissés nus, les pierres plus ou moins saillantes, les joints plus ou moins "beurrés". Sur ces murs on peut apprécier la grande variété de galets aux multiples couleurs, révélant la nature des roches et leur origine géologique.

LA TERRE CUITE   Retour en Haut de Page 

Dans les rives de la Bléone, de la Durance, affleurait des "veines" d'argile, cela permettait de fabriquer des tuiles et des briques. Il y a eu au moins trois ateliers de tuiliers connus sur la commune. Un légèrement au nord de Notre-Dame, sur les rives de la Bléone, un autre sous le vallon de Saint-Joseph et un autre sous Ragony.

Ces ateliers de tuiliers avaient une production essentiellement locale, car les autres communes avaient elles aussi leurs ateliers. A la fin du XVIIIème siècle, la tuilière de Notre-Dame et celle de Ragony s'épuisent. La municipalité s'inquiète de ce manque et cherche le moyen d'installer un tuilier à Saint-Joseph pour approvisionner la commune.

Au cours du XIXème siècle ces petits ateliers ruraux ont été concurrencés par les fabriques qui commençaient à se mécaniser, puis ont été complètement abandonnés au profit des matériaux industriels (tuiles mécaniques, dites de Marseille parce qu'elles venaient de la fabrique de Saint-Henri, et briques creuses... ). Ces tuiliers faisaient aussi des briques, des "malons". Les briques étaient dans certains cas utilisées pour l'encadrement des ouvertures, pour faire des cloisons. Les "malons" servaient pour "camarer" les toitures (c'est à dire qu'ils étaient posés sous les tuiles pour une bonne isolation du toit), pour aménager les boulins d'un pigeonnier....

Un petit bastidon au quartier Notre-Dame, à ses murs confectionnés en briques de terre crue. C'est le seul cas d'utilisation de ce matériau que nous avons trouvé sur la commune. Il se trouvait à proximité immédiate de la tuilière et il est encore solide aujourd'hui.

L'argile extraite du sol avec des moyens simples (pioche, pelles ... ) était laissée à tremper puis à décanter dans des bassins. On séparait l'argile plus fine réservée pour les tuiles, l'argile plus grossière était destinée aux briques. L'argile, amenée par brassage, à une bonne consistance plastique était mise en forme dans des moules en bois, puis on laissait sécher plusieurs jours à l'air libre sous un simple abri. C'est là, que les poules, chats, chiens... , de la maison, pouvaient marcher sur les briques encore fraîches et laisser leurs traces, que l'on retrouve aujourd'hui, marquées dans la terre cuite.

Ces matériaux séchés, étaient cuits dans un four aménagé sur place, la température de cuisson devait atteindre environ 700°. Le four doit être chauffé progressivement pour éviter toute casse et pendant les 2 ou 3 jours suivant la quantité de tuiles et de briques que contenait le four. Un bon approvisionnement en bois était nécessaire. Après la cuisson toutes les ouvertures du four étaient obturées pour ralentir le refroidissement du four.

LA CHAUX   Retour en Haut de Page 

La chaux, surtout avant le XIXème siècle était fabriquée sur place dans des fours sommairement aménages dans un talus, une bordure. Les pierres calcaires étaient chauffées vers 850°. Il fallait créer un bon tirage par des jeux de cheminées et de circulation d'air. Après refroidissement, on défournait. On enlevait les pierres mal cuites, les impuretés et on récupérait la chaux qui était de plus ou moins bonne qualité suivant la nature des pierres et la façon de les cuire.

A la sortie du four, on obtient de la chaux vive. Le calcaire (carbonate de calcium : CaC03) chauffé, libère le gaz carbonique (C02) qu'il contient et devient de la chaux vive (CaO). Plus le calcaire est "pur", c'est à dire plus il est riche en carbonate de calcium, plus la chaux est "grasse" ou "aérienne". Plus le calcaire contient de l'argile (plus il est marneux) plus la chaux est hydraulique ".

Le ciment, d'un usage beaucoup plus récent, est obtenu par cuisson de calcaire, mais aussi d'autres mineraux renfermant de l'argile, des carbonates de fer, de la silice, de l'alumine....

Pour utiliser la chaux vive, il faut "l'éteindre" avec de l'eau. Elle " chauffe ", " gonfle " devient un hydrate de chaux. Quand elle est bien "éteinte", cette pâte est mélangée avec du sable pour obtenir le mortier. Il faut un sable bien lavé, ne contenant plus de "mite" (boue, vase). Le mortier de chaux, employé dans la construction, au contact du gaz carbonique de l'air, va, petit à petit se carbonater, se durcir, et reformer du carbonate de calcium. Mais cette carbonatation n'est jamais complète , il reste toujours un mélange de carbonate de calcium et d'hydrate de chaux. Les bons mortiers de chaux durcissent dans le temps.

Il ne semble pas y avoir eu sur la commune de fours élaborés, installés à demeure, ayant fonctionné longtemps au même endroit. Il n'y a eu que des fours temporaires, à proximité des chantiers.

A la fin du XVIIIème siècle, lorsqu'a été percée "la Mine", pour évacuer les eaux du vallon de la Combe, il fallut construire le mur barrage et l'aqueduc d'évacuation des eaux. La commune qui met ce chantier aux enchères permet "aux entrepreneurs de faire dix fours à chaux dans les bois taillis de la communauté qui se dégradent par vétusté et qui ont besoin d'être renouvelés par des coupes faites à propos". Et déjà, "des coupes de bois furent faites en 1770pour les fours à chaux qui servirent à faire les contremurs le long du torrent actuel. "
Délibération du Conseil Municipal des Mées - 20 mars 1785

Comme pour les tuiliers, à partir du XIXème siècle, des fours à chaux industriels remplacent petit à petit les fours locaux.

Four a chaux temporaire :

LES MATERIAUX IMPORTÉS   Retour en Haut de Page 

D'autres matériaux étaient aussi utilisés pour compléter ou améliorer l'usage de ceux trouvés sur place.

Les pierres de taille
Les pierres pour être taillées, provenaient de Mane, Forcalquier, Ganagobie, dans un calcaire tendre se taillant aisément. La pierre de Mallefougasse et Monfort est plus dure, de même que les grès de Mirabeau, d'Aiglun ou de Gaubert. Ces pierres nécessitaient le transport, la taille, ce qui augmentait considérablement 1 e coût de construction. Elles étaient utilisées pour les chaînages des angles, les encadrements des ouvertures, dans les maisons plus "bourgeoises". Plus la quantité de pierres de taille est importante, plus cela annonce l'opulence du propriétaire.

Le plâtre
Le plâtre provenait essentiellement de Digne ou de ses environs, où il était abondamment exploité.

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