Les Amis des Mées
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EN CONSTRUISANT LE NOUVEAU CIMETIÈRE

Sans être fiers du nouveau cimetière situé un peu trop loin de la ville, nous l'appelons cependant avec une certaine satisfaction: le Nouveau Cimetière,

Erreur... "Rien de nouveau sous le soleil, écrivait dans le Livre de la Sagesse, il y a 3000 ans, le roi Salomon." - Oui, rien de nouveau...

A 1'ombre apaisante des Oliviers que l'on a arraché pour tracer les allées funèbres, des hommes dormaient déjà depuis des siècles,

En creusant pour la construction d'un caveau, M. Brun, entrepreneur, a découvert à 2 mètres de profondeur, un cercueil fait de dalles en terre cuite, assemblées au ciment ... Emoi en ville... chacun voulut aller voir. Très sagement Monsieur le Maire avait interdit de rien toucher avant la visite d'un archéologue qu'il avait fait avertir. Mais le pic du terrassier avait écorné une dalle et par l'ouverture, on pouvait voir encore bien dessiné, un squelette humain.

Monsieur l'archiviste départemental arrivé sur les lieux le lendemain déclara sans hésiter que l'on se trouvait devant une tombe gallo-romaine du 5ème ou du 8ème siècle.

Le mobilier funéraire ne se composant que d'un lacrymatoiree - en l'espèce un petit "toupin" en terre cuite, assez bien conservé, - on ne pouvait faute d'autre indice, préciser davantage.

Et cependant du premier coup, M. Baillache avait deviné juste. Voici qu'au cours de ces travaux, M. Brun découvrit quelques jours après, une petite pièce de monnaie, malheureusement très oxydée. Délicatement décapée, la pièce, d'un beau bronze, laissa voir une belle tête portant le diadème impérial, et cette inscription D? N. GRATIANUS. 0. F. AUG. (Gratien, très bon et heureux empereur).

Au revers, un guerrier tenant de la main gauche le LABARAM et posant la main droite sur la tête d'un homme à genoux près de lui. En exergue, cette devise: GLORIA ROMANORIUM.

Gratien, dont cette pièce porte l'effigie a été Empereur de 375 à 383. Il est mort tout jeune, assassiné à Lyon, à 24 ans; pleuré par St Ambroise, évêque de Milan qui était son conseiller et le considérait comme un saint.

La sépulture en question est donc contemporaine ou postérieure au règne de Gratien. Elle cachait les ossements d'un homme de condition modeste, mais jeune, car la tête, bien conservée, offrait l'alignement impeccable de 32 dents, encore intactes.

Serait-ce un des soldats de Gratien tombé au cours de la campagne que dut entreprendre cet empereur contre Maxime, l'officier en révolte, qui traitreusement l'assassina à Lyon ? ...

Maintenant, soigneusement emballé dans plusieurs caisses, le fameux cercueil a pris le chemin du Musée départemental. Peut-être d'autres, découvertes suivront-elles, car les ossements humains trouvés épars autour du cercueil laissent supposer que ce n'était pas là une tombe isolée.

Après cette trouvaille et si l'on s'en rapporte à l'historien des Mées, M. Esmieu, qui situe en cet endroit le théatre de plusieurs batailles, on s'explique facilement que le ravin creusé au sud de la ville garde, de temps immémoriaux, le nom lugubre de Vallon de la mort.

Au fait, pouvait-on trouver mieux comme emplacement du nouveau cimetière?

Henri SAVORNIN
Extrait du bulletin paroissial de janvier 1933


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